Le Mystère de la momie tatouée
En 2005, à 640km au nord-ouest de Lima, près du sommet d'une pyramide nommée Huaca
Elle vécut et s’éteignit, voilà 1600 ans, parmi les Moches de l’ancien Pérou, un peuple dirigé par des chefs redoutables. Cette femme remarquable fut enterrée avec les symboles du pouvoir, dont une couronne d’or décorée d’un visage à l’expression féroce et surnaturelle Les Moches n’embaumaient pas leurs morts. La plupart des corps se décomposaient naturellement. Toutefois, en quelques rares occasions, la nature et l’homme alliaient leurs efforts pour préserver un défunt sous forme de momie. C’est le sort qui fut réservé à la femme tatouée : sa dépouille savamment enveloppée fut retrouvée l’année dernière à El Brujo (le sorcier), un site cérémoniel situé sur la cote nord du Pérou. Se hissant au pouvoir mile ans avant les Incas, son peuple créa une culture sophistiquée, aujourd’hui célèbre pour les céramiques et les ouvrages en métal exceptionnels qu’elle a produits.
Selon une autopsie récente, la femme tatouée aurait donné naissance à un enfant au moins et n’aurait pas vécu plus de trente ans. Quant à la cause de sa mort, rien ne permet de la déterminer avec précision. Ses proches l’installèrent pour l’éternité au sommet d’un temple où se déroulaient des sacrifices sanglants. D’abord enduits de cinabre – un minerai rouge associé à la force de vie du sang -, ses restes furent enveloppés dans des bandes de coton avant d’être ensevelis sou d’épaisses couches d’adobe. Le climat sec du royaume désertique des Moches se chargea ensuite de dessécher le tout. Aucune autre femme comme elle n’avait jamais été mise au jour « L’étude que nous avons menée permet de croire qu’elle occupait une fonction dirigeante. », précise l’archéologue Régulo Franco. Si, c’est le cas, la femme tatouée révolutionnerait toutes nos idées sur les Moches, dont on pensait jusqu ‘à présent que le pouvoir appartenait aux hommes. Le royaume des morts Au dessus du pacifique, une enceinte richement décorée contient quatre tombes ; la plus importante, celle de la femme tatouée date de 450 ap. J.C. ; les autres en cours d’étude, sont celles d’hommes. « Erigée pour elle dans un espace sacré, cette terrasse était le mausolée de la senora » explique Régulo Franco. Ceux qui lui rendaient hommage brûlaient des offrandes et versaient des libations dans un récipient placé au dessus de sa tombe. C’est sous six couches d’adobe, un échafaudage de bambou, un tapis tressé en roseau et six troncs d’arbres que les archéologues découvrirent l’épaisse enveloppe contenant son corps. A ces coté gisait le squelette d’une jeune fille sacrifiée, le cou ceint d’une corde. Apres l’avoir extraite avec précaution, des techniciens portèrent la momie au laboratoire pour la désenvelopper. La cote pacifique du Pérou a accueilli nombre de cultures successives. C’est dans les vallées fluviales andines que celle des Moches prospéra pendant plus de sept siècles. El Brujo était un siège de pouvoir parmi tant d’autres. A l’instar de Sipan, où deux dirigeants de sexe masculin furent mise au jour dans les années 1990
Qui était ce personnage d’élite ?
Des détails étonnants Découverte unique dans une tombe Moche, un visage brodé orne l’enveloppe funéraire de Confusion identitaire En retirant les premières couches de tissu, les spécialistes ont découvert des feuilles d’un alliage or-cuivre encadrées de deux immenses massues de combat cérémonielles. Ce type d’arme n’ayant jamais été trouvé auprès d’une femme, les chercheurs pensaient avoir affaire à un défunt de sexe masculin. Mais, sous le rembourrage en coton de la couche 17, Arabel Fernandez et une assistante ont mis à jour des outils de tissage, une activité probablement féminine. Plus loin encore, des bandes d’or cousues ensemble laissent deviner la forme de ce curieux personnage. Un trésor intact Un bol d’or recouvre le visage de la momie tandis que des perles s’échappent de colliers depuis longtemps réduits en poussière. Deux anneaux de nez révèlent une de leurs faces symétriques : une tête picorée par un condor et un homme muni d’une massue de combat. De telles parures, trouvées jusqu’à présent auprès d’hommes de haut rang, ajoutent au mystère – d’autant qu’un examen confirme que la momie est bien de sexe féminin. Utilisait-elle tous ces objets de son vivant ? Où certains devaient-ils témoigner post mortem de son rang de naissance ? Des éléments d’enquête Bien qu’elle ait conservé les tresses traditionnelles des femmes Moches, cette femme étonnante s’est sans doute appropriée les vêtements et les accessoires masculins du pouvoir lors de son accession au sommet de la hiérarchie, à El Brujo. Prenait-elle l’aspect, lors des événements officiels, d’une figure mythologique associée aux cérémonies sacrificielles, un collier de t^tes autour du cou et l’une des quatre couronnes de son enveloppe mortuaire au sommet du crâne ? Brandissait-elle une massue de combat tout exhibant de délicates boucles d’oreilles ? Ces questions, parmi tant d’autres, figurent au programme des études en cours. Reportage de A.R. William ( national Géographic de Juin 2006) A lire : La civilisation Moche ainsi que dans nos archives A lire : http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/20060517.OBS7987/ http://elbrujoperu.xanga.com/ (en Espagnol) voir les photos http://fr.wikipedia.org/wiki/Moche_(culture)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Moche_%28civilisation%29